Avec le lancement de son groupe de recherche blockchain, dirigé par David Marcus, ancien responsable de Messenger, Facebook a fait un rebond de marché baissier.

Après plusieurs mois de critiques contre Facebook concernant le scandale de Cambridge Analytica, et par extension contre les lacunes de Facebook en termes de protection des données et de responsabilité, l’entreprise avait bien besoin d’un peu de répit. C’est exactement ce que quelques jours de rumeurs confuses sur la manière dont Facebook envisageait l’utilisation d’une blockchain ont fourni.

Mais bien que les questions dernièrement soulevées des deux côtés de l’Atlantique aient pu contribuer à ce lancement, Facebook a toujours été destiné à se lancer sur la blockchain. C’est en partie parce que tout le monde dans la Silicon Valley s’y met aussi. Amazon, Google et Microsoft ont tous récemment lancé des projets impliquant la technologie blockchain ; même Apple, en 2017, a déposé un brevet qui laissait entendre son intérêt pour les registres distribués.

Facebook avait chargé un seul employé, Morgan Beller, de se pencher sur le sujet il y a presque un an. Pourtant, quelque chose ne tourne pas rond. Conçue d’abord comme la fondation numérique pour la monnaie virtuelle bitcoin, une blockchain est un registre en ligne public permanent qui traite des transactions à l’aide d’un essaim d’ordinateurs plutôt que d’un seul serveur central.

L’inventeur de bitcoin Satoshi Nakamoto a clairement exprimé sa volonté de se débarrasser des banques centrales et des sociétés émettrices de cartes de crédit en utilisant le système peer-to-peer blockchain.

Il va au-delà de l’aspect financier : les gens dans la sphère de la blockchain évoquent depuis longtemps la décentralisation du web lui-même. Ils aspirent à la chute des plates-formes technologiques centralisées comme Facebook ou Google et à l’émergence de communautés en ligne qui permettraient aux utilisateurs de se connecter sans confier leurs données à des entreprises intermédiaires. Les avantages de ce modèle sont nombreux, comme un plus grand contrôle pour les utilisateurs sur la façon dont leurs informations personnelles sont utilisées.

En avril, ironiquement, Brittany Kaiser, ancienne directrice de Cambridge Analytica, s’est jointe à IOVO, une entreprise basée sur la blockchain qui a pour objectif de permettre aux gens sur les réseaux sociaux de décider avec qui ils partagent des données. (Fait divers pour les amateurs de théories du complot : tous les acteurs du récent scandale, y compris Aleksandr Kogan et Steve Bannon, et même Cambridge Analytica, ont des antécédents en matière de monnaie virtuelle).

D’autres projets de réseaux sociaux basés sur une blockchain ont été lancés, en particulier Steemit, une plate-forme où les utilisateurs sont récompensés par de la monnaie virtuelle au lieu de J’aimes, même si aucun de ces projets n’est encore connu.

Bien qu’il soit farfelu de penser que Facebook ait choisi de se suicider par la décentralisation (soit en abandonnant le contrôle des données de ses utilisateurs, soit en réduisant son monopole), l’entreprise a peut-être décidé d’essayer de mieux connaître son ennemi ou de se lancer sur la blockchain avant qu’une véritable concurrence n’émerge.

Une seule chose suggère que Facebook prépare quelque chose de gros : le haut calibre des personnes impliquées. David Marcus est l’homme qui a fait de Messenger la machine de guerre qu’elle est aujourd’hui ; Kevin Weil et James Everingham, deux cadres supérieurs de la nouvelle division de la blockchain, étaient des cadres supérieurs importants chez Instagram. Pourquoi Mark Zuckerberg aurait-il demandé à ce trio d’employés remarquables de travailler sur une simple expérimentation ?

Comme TechCrunch l’a fait remarquer, Messenger et Instagram ont été si perfectionnés qu’ils sont devenus ennuyants pour Marcus et ses collègues d’Instagram. En créant ce nouveau jouet pour qu’ils puissent s’amuser avec, Facebook a évité de les perdre face à la concurrence.

Nous savons que Marcus (tout comme, dans une moindre mesure, Everingham) est un partisan de la blockchain : spécialiste du paiement et ancien président de PayPal, il possède des bitcoins depuis 2012, et a souvent parlé de son potentiel. Il a récemment rejoint le conseil d’administration de Coinbase, un service bureau de change de monnaie virtuelle. En février, Marcus a annoncé que les paiements en monnaie virtuelle n’allaient pas être implantés sur Facebook (et, en particulier, sur Messenger, qui inclut une fonction de paiement) dans le futur proche : ils étaient encore trop lents et trop chers. Maintenant, Marcus va pouvoir tenter de résoudre le problème ou inventer d’autres services alimentés par la blockchain dans sa toute nouvelle usine à idées.

Peut-être que quelque chose de bien en résultera. Mais une chose est sûre : la rumeur très répandue d’un FaceCoin, une monnaie virtuelle créé par Facebook, est très probablement fausse. Facebook n’a pas besoin d’un autre scandale réglementaire.