Une affaire de justice et d’injustice

Quand l’injustice frappe, elle le fait souvent avec la précision et la subtilité d’un coup de marteau. Et quand celle-ci se sert d’un porte-voix aussi puissant que celui utilisé par une grande agence de presse comme Reuters, vous pouvez toujours essayer de la combattre, mais une odeur de soufre peut alors affecter une grande part de votre réputation et vous causer un préjudice irrémédiable.

C’est en ce jour d’hiver de décembre 2017, à Bruxelles, que l’enfer s’est déchaîné sur Albert Karaziwan, PDG de la société belge Semlex, une entreprise pourtant innovante et largement acclamée. Et tandis que Karaziwan et son entreprise compagnie combattent férocement les préjugés et l’injustice, Reuters tente de les écraser par la portée de ses propos et par son influence.

Diffamation flagrante

Un jour, quelqu’un a dit: « Vous savez ce qui se passe quand vous glissez votre joue sur le bord d’une lame de rasoir tranchante? Oui! C’est exactement ce qu’il se passe quand vous confiez vos rêves aux mains de personnes néfastes et négatives! »

Albert Karaziwan a d’abord été diffamé. La petite soixantaine et père de quatre enfants, ce célèbre entrepreneur vit à Bruxelles. Il a fondé et dirigé plusieurs entreprises internationales réputées, spécialisées notamment dans l’immobilier et, plus récemment, dans les passeports biométriques.

Sa dernière entreprise, Semlex, est créée en 1992. Semlex s’appuie sur une large expérience dans le développement, l’intégration, la gestion opérationnelle et la fourniture de systèmes de haute technologie dans l’identification et l’authentification. Semlex est une entreprise phare et mondialement reconnue, spécialisée dans la fabrication de passeports biométriques ainsi dans d’autres documents d’identification et de sécurité.

L’intrigue fabriquée par Reuters

Tout a démarré en avril 2017, avec la publication par Reuters d’un article écrit par le journaliste David Lewis et intitulé « Le couteux passeport biométrique de la RDC ». Dans cet article, Semlex est accusé de vendre à la RDC (République Démocratique du Congo) le passeport le plus cher au monde, dans un article lourd de sous-entendus, qui laisse entrevoir des accusations de pots-de-vin et de corruption.

David Lewis a récidivé dans un deuxième article écrit en décembre 2017, en lançant cette fois des accusations infondées envers Semlex pour des activités menées dans l’état insulaire des Comores, dans l’Océan Indien. La combinaison de ces deux articles provoqua une pression irrésistible pour d’autres médias internationaux, accentuant le dénigrement et l’injustice subis par Semlex et son PDG, Albert Karaziwan.

Pour compliquer les choses

Le déploiement des passeports biométriques n’a pas aidé. Les problèmes ont éclaté à Kinshasa, capitale de la RDC, le 15 septembre 2017, quand le vice-ministre des Affaires étrangères de la RDC a annoncé l’invalidation des passeports semi-biométriques alors en vigueur, donnant aux citoyens jusqu’au 16 octobre, soit un mois, pour les remplacer par de nouveaux passeports biométriques.

Cela a naturellement suscité un tollé général, en particulier chez les groupes d’opposition au gouvernement, au motif que :

  • les nouveaux passeports coûtaient le prix soi-disant exorbitant de 185 $ ;
  • tout ceci au moment où le pays traversait une période de ralentissement qui menaçait son tissu économique.

Ton accusatoire mais aucune preuve

Pour commencer, le contrat que la RDC a signé a suivi une offre longue, transparente et supervisée au niveau international, opposant Semlex à des rivaux bien établis : Zetes, Gemalto et Oberthur. Face à cela, plusieurs médias bien informés ont rapporté des rapprochements de longue date entre le journaliste accusateur David Lewis et l’entreprise concurrente Zetes.

En janvier 2016, et contrairement aux autres enchérisseurs, Semlex a remporté l’offre grâce à une proposition à la RDC jugée « juste et honnête », fournissant clé en main et à prix coûtant ce qu’on appelle un contrat de type BOT (« Build-Operate-Transfer »). Cette offre incluait la perspective extrêmement attrayante pour le gouvernement-acheteur de ne pas engager de frais initiaux ni de frais d’infrastructure.

Combien coûtent les passeports ?

Selon les termes du contrat, la RDC conserve 120 $ des 185 $ représentant le coût total du passeport biométrique, le solde de 65 $ revenant à Semlex. En plus de cela, Semlex finance l’ensemble de l’infrastructure du projet, y compris la mise en place de 26 centres régionaux de délivrance de passeports ainsi que l’équipement de 60 ambassades et consulats de la RDC dans le monde entier pour l’enregistrement et la délivrance des passeports.

Mais en plus de ce que Semlex offre en termes de dépenses initiales et de dépenses de gestion et de maintenance, le passeport biométrique lui-même constitue un outil de haute sécurité, à la pointe de la technologie. Il est pratiquement impossible à contrefaire ou à dupliquer. Il est donc nécessairement plus coûteux que le passeport utilisé habituellement et presque universellement. Au vu des problèmes de falsification de passeport que la RDC a rencontrés par le passé, le gouvernement lui-même a opté pour un produit haut de gamme.

Ce que coûtent les autres passeports

Laissons à d’autres revues africaines le soin de prolonger les débats sur Semlex, Albert Karaziwan et la question du passeport biométrique. Jeune Afrique, une publication tunisienne à large audience, explique que le passeport africain le plus cher est celui du Tchad, qui coûte 228 € contre 168 € pour celui de la RDC.

Le Vif, un autre magazine affilié au journal français L’Express, va plus loin encore en affirmant que le passeport le plus cher au monde est celui de la Belgique, qui coûte environ 40% de plus que le passeport de la RDC. (Le Vif -2011)

Enfin, il est à noter que les passeports tchadiens et belges ne sont pas de type biométrique.

Quels pots-de-vin ?

Ceux qui propagent ces rumeurs prétendent que des personnes importantes, au sommet du gouvernement de la RDC, ont empoché d’importantes sommes d’argent grâce au marché remporté par Semlex. Ils prétendent avoir des preuves que cet argent a été placé dans une banque de Dubaï. Ce raisonnement n’a cependant pas tenu compte du fait qu’il n’y avait pas de commission initiale dans l’affaire Semlex pour alimenter de tels pots-de-vin. Alors, d’où pourraient venir ceux-ci ?

Une affaire de mauvais perdant ?

Comme cela a déjà été évoqué, il n’est pas facile de réduire la portée et l’influence de Reuters. Ce que Reuters dit est généralement repris par des centaines d’autres publications dans le monde entier, l’effet d’entraînement constituant un tsunami d’insinuations et d’accusations qui transcende le fait qu’il n’existe aucun fondement factuel pour corroborer ces affirmations.

Il faudrait peut-être une autre agence que Reuters pour investiguer les allégations fréquemment rapportées du lien qui unirait le journaliste David Lewis au concurrent Zetes et Zetes lui-même à d’importants centres politiques, à Bruxelles et à Kinshasa. Toute cette agitation n’était-elle qu’une affaire montée de toute pièce par un mauvais perdant ?